L'identitaire idéologique

De siècle en siècle, les entités auxquelles s'identifient les hommes se métamorphosent, car l'humain change avec son environnement, son contexte historique, technologique et socio-politico-économique. Au 20ème siècle, on a vu émerger des nationalismes nouveaux, empreints d'une saveur idéologique aux couleurs politiques. Auparavant, la nation était une évidence territoriale et la domination était exercée localement par des peuples de races différentes. Les révolutions des XVIII è et XIX è siècles ont émancipé les peuples qui ont infléchi l'orientation du destin dans la direction du monde, non sans clash entre eux.

Aujourd'hui, on observe une division importante pour les sociétés développées dans les velléités, idées et directions envisagées. Néanmoins, l'orientation se veut une et unique en vertu des lois républicaines qui définissent les rêgles du jeu ayant pour but de péréniser le vivre ensemble. C'est donc l'intérêt de la majorité qui permet de conduire l'évolution de nos sociétés. Cela peut être bénéfique quand les conditions permettent une réflexion sereine et raisonnable. Cela n'a pas toujours été le cas. La construction européenne a constitué une avancée dans la mesure où elle a permis à des peuples de converger en concourant leurs forces plutôt qu'en épuisant celles-ci à des luttes stériles. Par contre, la manière dont l'Europe se construit peut changer sa nature à partir du moment où celle-ci devient une réalité palpable, où elle devient une idéologie impactant les peuples en leur donnant une identité qui transcende leurs appartenances antérieures. L'Europe est un bon exemple de l'impact psychologique que peut avoir l'environnement ambiant sur l'individuel et le collectif. Actuellement, une sorte d'équilibre existe entre l'identité européenne et l'identité locale, qui font que les jugements sont mesurés. C'est un peu ce que nous inspire l'exercice démocratique dans une assemblée où la diversité de représentation préserve le débat et la maturité du raisonnement. Si l'Europe dérive vers une autorité unique ou ascendente vis à vis des Etats, nous risquons de retrouver une résurgeance d'une sorte d'empire, image de l'Empire Romain ou du Saint Empire Romain-Germanique.

J'ai récemment été frappé d'une caractéristique prédominante mais sous-jacente d'un film de science-fiction que je suis allé voir : Valérian et la Cité des milles planètes. Au delà de la prouesse artistique que représente ce film, le vivre ensemble entre différentes communautés dans cette cité, est mis en valeur via le terme de République. Ce n'est pas la première fois que cet idéal est avancé. Pour exemple, Star Wars met bien en situation de conflit la République et l'Empire, sous-entendu les méchants ce sont ceux qui défendent l'Empire. Malgrès tout, ce qui est frappant, c'est de voir que chaque peuple représenté garde ses caractéristiques distinctes et possède ses propres porte-paroles. Même la Chine, la Russie continuent d'exister ainsi que leur identité propre. Evidemment, car on admet sans le dire, qu'une fusion totale des peuples, mènerait à une confusion plutôt qu'à un enrichissement mutuel par une diversité réelle.

La difficulté aujourd'hui, c'est qu'on définit une identité territoriale (droit du sol), et que la précédence voulue pour la négation des différences et le laïcisme, conduit à un idéal de nation mélangée qui n'aurait plus qu'une motivation : le laïc. Or, c'est le paradoxe, le laïc n'a jamais motivé qui que ce soit, c'est d'une saveur insipide, nécessaire certes pour régir les lois communes, mais totalement neutre. On ne voit pas pourquoi une nation, avec le temps, dénuée de toute signification identitaire basée sur l'apport civilisationnel, conserverait un patrimoine qui lui deviendrait étranger. Donc l'histoire s'effacerait, l'oubli d'efforts anciens, et la sagesse du savoir tout autant. Le laïc n'a qu'un intérêt réel, celui d'estomper toutes les entraves économiques et sociales au business. Il s'agit donc non de vertu, mais plutôt d'intérêt. Pourquoi, en effet, se développent aujourd'hui autant de scandales financiers mais pas que... C'est bien que notre société récompense non pas la vertu, vue comme une force dangereuse, mais l'intérêt individuel.

On avait tendance à opposer individualisme et communisme, mais il faut reconnaître qu'au final, c'est un peu la même chose, sauf qu'au lieu de la carotte dans la dictature du communisme, on brandit le baton.

(to be continued)